Maison de la
ruralité
Maître d'Ouvrage : Commune d'Incourt
Architectes : Archisanat & BC-architects
Lieu : Opprebais
Programme : salles polyvalentes
Année : 2017
Architecture : Bio-climatique
Concept : "Une grande toiture qui ressemble
et qui rassemble"
Matériaux naturels : terre, paille, bois,...
Techniques : Charpente bois, pisé, participatif
Statut : concours
Une phrase vient à l’esprit : “le pays où les granges sont des navires”. Ces volumes qui ponctuent le paysage impriment une image forte et une identité propre à la région.
L’idée principale du projet découle de cette identité: elle consiste à créer une grande toiture qui rassemble.
Historiquement, la grange est le lieu qui accueille les activités agricoles et l’entreposage. Peu à peu les granges ont été ré-affectées à divers usages. Voici le projet d'une grande toiture qui abrite les usages d'aujourd'hui.
Pays de la terre, Pays de matières. Au pays des champs cultivés, la terre est omniprésente. Elle représente la matière première. La paille est à portée de nos mains.
La terre crue et la paille sont des matériaux de Wallonie: ils sont sains et écologiques; ils sont disponibles localement ; cela diminue les énergies dépensées pour le transport; ils font partie d’un cycle de production économique et ils sont renouvelables; ils nécessitent une haute intensité de main d’œuvre mais confère ainsi une place privilégiée au travail de l’homme.
Ce projet est conçu avec des matériaux biosourcés aux nombreuses propriétés et qualités: régénératifs, isolants, perspirants, sains.
Un toit qui rassemble. Des matériaux sains et naturels.
Un projet participatif. Des rencontres intergénérationnelles.
S'inspirer du Patrimoine
Le projet proposé est une ré-interprétation des granges de Hesbaye Brabançonne , redessiné de façon contemporaine.
Un volume compact, simple, présent sur la place. Un volume qui évoque le lieu de rassemblement, la protection, le patrimoine. C'est une architecture qui véhicule à la fois le sentiment de fierté de son patrimoine et une volonté de se tourner vers l’avenir. Elle tend vers la forme intemporelle en s’inscrivant fortement dans son contexte.
Processus participatif
Certaines installations ou constructions sont proposées au travers du processus participatif. C’est une volonté de donner une autre dimension, sociale et participative, au projet de construction de la maison de la ruralité. Ce caractère participatif permet d’entamer le processus d’appropriation du nouveau bâtiment par les habitants.
Les matériaux de construction “terre” ou “paille” sont des matériaux qui permettent d’engager un processus participatif autour de la réalisation d’un nouveau projet. En procédant par phasage et en ponctuant le projet d’ateliers ouverts à tous, c’est aussi une manière de laisser la place aux habitants. C’est une manière pour eux de déjà s’approprier leur future salle! La construction en terre va ainsi raconter une histoire, leur histoire, car c’est un matériau qui garde l’empreinte de la main humaine.
La réalisation des “ranges-vélo” est l’opportunité d’organiser ces ateliers participatifs. Par ailleurs, des ateliers découvertes peuvent être programmés à l’attention des enfants: le matériau “terre” engendre une appropriation rapide et ludique de modes constructifs, et un éveil à l’architecture et au patrimoine qui nous entoure.
Le chantier est le moment de la mise en valeur de savoir-faire locaux et d’y mettre à l’honneur le travail et les compétences des agriculteurs, ainsi que des matériaux qui font partie de leur quotidien.
Maison intergénérationnelle
La Maison de la ruralité est décrite comme une maison intergénérationnelle. Elle est le lieu de rencontre d’habitants de tous âges. Dans ce projet, des idées d’activités et de fonctionnements dans cet “équipement public” qu’est la Maison de la ruralité sont proposées afin de tisser les liens entre toutes les générations: les aménagements intérieurs et extérieurs sont liés à ces fonctionnements.
La commune d’Incourt connait un taux de natalité croissant. Des réponses en terme de capacités d’accueil de la petite enfance et de la jeunesse ont déjà été apportées et d’autres sont encore possibles, notamment dans le cadre du projet de la Maison de la ruralité. De la même manière, de l’autre côté de la pyramide d’âge, les besoins se font sentir pour la population vieillissante, dans une société qui a développé des modes de fonctionnement très indépendants.
Les parcelles avoisinantes sont la propriété du CPAS d’Incourt. Alors, il n’y a qu’un pas à faire pour imaginer de maisons “kangourou”, qui permettrait de donner une place appropriée et un rôle à chaque habitant, quel que soit son âge.
La compacité et les économies d’énergie liées à l’usage
Le parti architectural principal est de créer cette grande toiture qui abrite un “cœur de terre”: il s’agit donc de trouver l’équilibre entre la grande “halle” en tenant compte des fonctions qu’elle accueille, et le cœur central qui accueille les activités de groupes plus petits et à vocation plus intimiste (du type du travail de bureau, de lecture, de réunion,...
La compacité du projet est aussi synonyme de maîtrise budgétaire et énergétique : un volume simple et compact comporte moins de difficultés constructives, en plus de limiter le nombre de façades. A l’usage, ce projet sera moins consommateur en énergie, tant par son efficacité thermique (leur coeur central est très isolé et performant), que par la qualification variée des espaces selon leur utilisation (la grande salle polyvalente n’est chauffée que lorsqu’elle est utilisée, et ce, pour atteindre un niveau de confort correspondant à l’activité).
Polyvalence et multi-fonctions
Le concept de construire une grande toiture sous laquelle on se rassemble, permet également une flexibilité quant à l’aménagement intérieur.
Les options sont multiples pour répondre aux fonctions destinées à la Maison de la ruralité. En concertation avec la commune d’Incourt et en travaillant sur le programme et les besoins, il est possible de déterminer l’occupation sous la grande “halle” de manière optimale. Et de dédier des parties plus intimes et protégées : il s’agit de celle comprenant un “cœur central”, le cœur “en terre” de la Maison de la ruralité!
1- la “grande salle polyvalente” permet d’accueillir une centaine de personnes : elle est dédiée aux événements, aux spectacles, aux fêtes, aux sports de sol, au projection de films, au marché des produits locaux ou autre rassemblement important de personnes; sa capacité d’accueil peut être augmentée en ouvrant les cloisons amovibles vers la “salle commune”(voir suite); cette grande salle sous la toiture est conçue comme un jardin d’hiver. Elle est en relation avec les salles du coeur central. Les activités qui viennent occuper ce cœur central peuvent “déborder” dans les espaces avoisinants et les circulations, toujours couverts par la toiture; il est même envisageable que ces activités sortent et se prolongent sur la place d’Opprebais!
2- la “salle commune”, à l’intérieur du “cœur cental”, est une salle destinée au rassemblement de 50 à 70 personnes; elle accueille des activités en relation avec la cuisine et le bar ou tout aussi bien avec la grande salle polyvalente ; l’aménagement des cloisons permettra d’ouvrir totalement cette salle commune et d’en faire une prolongation de la grande salle polyvalente; cette salle commune peut être le lieu “numérique”, l’espace de co-travail, ou encore être occupée pour des ateliers de cuisine, ou des ateliers scolaires; la zone de “bar” permet également l’exposition de produits locaux; on pourrait imaginer des séances de “repair-café”,et même penser à la mise en commun de ressources et d’équipements; c’est peut-être le lieu de petits-déjeuner en famille, organisés avec la boulangerie toute proche; etc.
3- les “salles de groupe” sont plus petites et peuvent accueillir entre 6 à 10 personnes; c’est là que les asbl peuvent tenir leur réunion ou organiser une séance de travail; l’une d’elles peut être utilisée pour un espace numérique plus petit; chacun de ces locaux est polyvalent également.
A l’étage, on retrouve une salle polyvalente plus à l’écart, protégée de l’animation du rez-de-chaussée et lumineuse ; on peut y imaginer un coin lecture pour les enfants, une bibliothèque ou autres activités. L’étage accueille un local technique.
Concept structure
Dans les anciennes granges, le système structurel consistait en un assemblage de poutres et de poteaux en bois.
La structure en portique proposée pour ce projet est pratique et économique. Elle est pratique car elle libère plus de place intermédiaire entre chaque portique et en-dessous de sa structure.
La piste des structures agricoles peut être étudiée et adaptée pour influencer le coût de construction du projet.
Exactement à l’image des anciennes granges, les fermes (ou portiques) définissent les espaces qui peuvent être investis.
Concept matériaux
Tous les matériaux sont choisis consciencieusement : pour leur logique structurelle, pour leurs performances thermique et acoustique, pour leur aspect lié à la typologie, et pour leurs bénéfices écologique et social.
Le matériau typique pour la toiture des granges est la tuile. C’est une source d’inspiration pour le projet. Les granges étaient parfois faites de torchis dans une structure en bois.
La technique du pisé est exceptionnelle. En Belgique, les producteurs de matériaux en terre ont déjà standardisé et créé des formulations de terre, à l’instar de la production de béton. On parle de “béton de terre”.
Concept thermique
Le projet propose pour la Maison de la Ruralité deux types d’espaces intérieurs aux qualités et ambiances différentes.
Le premier espace, la grande salle polyvalente, est imaginée comme un jardin d’hiver, qui propose une température minimum, toujours dans la zone de confort de l’usager. Encore une fois, la référence de la grange revient: il faut se souvenir de ces nombreuses célébrations et fêtes de mariage qui ont lieu de nos jours dans les granges ré-aménagées pour l’occasion.
Le confort thermique minimum est assuré en tout lieu sous la grande ”halle” par un chauffage au sol couplé au système de géothermie. Ce genre de techniques mixtes ont déjà été réalisées sur des projets similaires en Belgique, et notamment lors de la rénovation d’une grange.
Le second espace est le cœur central est isolé. Étant déjà protégé par le “jardin d’hiver” , il nécessite moins d’apports et moins d’énergie pour être réchauffé et atteindre les températures de 18 à 22 °C pour ce type d’activités.
Un système de chauffage est intégré dans les murs et utilise la masse thermique du gros-oeuvre, en vue de réchauffer l’air environnant. “Earth Corps Activaton” : c’est le principe de chauffage par radiation, qui apporte la sensation de confort la plus agréable.
De chaque côté du bâtiment, pignon gauche et pignon droit, les murs en pisé peuvent jouer le rôle de “gaines solaires” car leur proximité de la façade leur permet de capter l’apport solaire et d’influencer sur la température de l’air.
L’objectif est de créer une ambiance de confort propre à chaque zone d’activités, en utilisant différentes techniques et en échangeant les apports de chaleur entre le “cœur central” en terre et la grande salle polyvalente.
Concept ventilation
La “grande halle” est ventilée naturellement par amenée naturelle de nouvel air auto-réglable et par évacuation naturelle auto-réglable. Le “cœur central” est ventilé par amenée naturelle auto-réglable (filtres dans les fenêtres) et évacuation à la demande, comme on le voit sur le schéma par le “Sytème C”.
L’utilisation de matériaux écologiques garantit l’étanchéité à l’air du “cœur central” et en même temps la perméabilité à la vapeur. C’est ce qui confère au bâtiment un caractère bio-climatique, un climat intérieur confortable et sain.
Concept lumière
Un mesurage de l’ensoleillement N-S-E-Ouest et de l’intensité lumineuse permet de travailler sur les ouvertes à aménager, et de disposer les ouvertures là où c’est nécessaire. Il s’agit de placer un plus grands nombres d’éléments translucides ou d’ouvertures au dessus du “cœur central”, afin d’apporter de la lumière dans ses salles intérieures.
Concept énergie
En développant un projet compact et assez simple dans sa volumétrie, le parti est déjà pris quant aux objectifs de réduction des énergies utilisées.
Le choix des matériaux agit également sur l’empreinte écologique du bâtiment: des matériaux locaux et naturels, qu’on peut appeler “bio-sourcés”, ont certains avantages: le transport jusqu’au chantier est réduit; ils ne nécessitent pas de procédés de transformation à émissions dans l’atmosphère; ils retournent à leur milieu naturel après usage. Bien-sûr, ces matériaux sont couplés avec d’autres matériaux de type industriel pour les potentiels de chacun se combinent.
D’autres gestes simples en terme d’économie d’énergie et des ressources doivent être mis en place : la récupération des eaux de pluie pour les sanitaires, des boutons poussoirs pour l’utilisation de l’eau, des minuteurs pour l’éclairage des espaces,etc. Il s’agit de trouver l’équilibre entre une certaine sophistication d’une part, qui utiliserait les nouvelles technologies développées de nos jours, et d’autre part une simplicité dans les choix architecturaux, des options de matériaux et de la construction du bâtiment.
La mobilité à la campagne
La maison de la ruralité s’inscrit dans un contexte de mobilité d’une commune et aussi d’une région. Les questions d’aménagements des abords touchent aussi bien des questions de proximité (lien avec l’école d’Opprebais par exemple), que des questions de mobilité au sens large. Quels sont les nouveaux moyens de déplacement? Comment répondre aux besoins de mobilité tout en préservant un environnement, et en évitant la saturation des voiries vers les pôles économiques. La réflexion autour de la maison de la ruralité fait partie intégrante d’une dynamique de connexions à travers la commune, entre les différents usagers de la mobilité (piétons, cyclistes, cavaliers, coureurs, automobilistes, poussettes, tracteurs, etc.) et aussi de connexions entre les réseaux principaux (routes) et les réseaux secondaires (sentiers).
Dans une vision de la mobilité au sens large, l’idée de proposer, au sein de la maison de la ruralité, des espaces de “co-travail” (co-working) pourrait inciter les habitants-navetteurs au télé-travail. Des solutions de co-voiturage (VAP-VAP par exemple) doivent être encouragées et intégrées dans les aménagements des abords, afin d’inciter aux nouveaux modes de déplacement adaptés à notre société.
La maison de la ruralité peut jouer le rôle de “charnière”, être conçue comme un lieu “pivot”; c’est l’occasion d’aménager les sols afin de créer des “ARTICULATIONS” à cet endroit d’Opprebais :
. articulation entre le réseau principal (route, voitures, tracteurs,...) et le réseau secondaire (sentiers, piétons, vélos ,...)
. articulation entre les sentiers existants, afin de les relier, de faire leur prolongation
. articulation grâce aux aménagements des revêtements de sol afin de marquer la “place d’Opprebais”, de faire le lien avec l'école,et de faire ralentir le trafic de la route principale
. articulation entre la longueur de la place et la direction perpendiculaire qui va être créée entre l’école et la maison de la ruralité
Les points forts de la proposition ci-jointe:
1- création de sentier publics pour faire le lien avec les sentiers existants
2- articulations des directions et des réseaux
3- intégration de l’étude “atingo” autour de l’école (dépose-minutes, accès piéton sécurisé vers l’école, parkings longue et courte durée)
4- créer le ralentissement des voitures
5- les parkings vélo sont des “workshop”, afin d’entamer le processus participatif du projet, autour du matériau “terre” et encourager à l’appropriation des aménagements
6- le jardin arrière est un lieu de rencontres intergénérationnelles (maison kangourou sur le terrain du CPAS, potagers communs, jeux pour enfants, interventions d’artistes)
7- les événements peuvent “sortir” à la fois à l’arrière et aussi à l’avant, sur la place d’Opprebais
8- libérer la place centrale : ne pas l’occuper par des parking! Les parking de la maison de la ruralité sont situés à l’arrière de la maison “des réfugiés”
9- libérer des vues vers les champs à l’arrière
10- proposition : le jardin est public, avec des heures d’ouverture et de fermeture ; les sentiers sont toujours ouverts, comme il en existe déjà à Opprebais.
L’équipe qui a composé ce projet avait pour objectif d’allier ses expériences et ses savoir-faire afin proposer un projet pilote et innovant à la commune d’Incourt.
Nous avons le sentiment que le projet de la Maison de la Ruralité porte en lui des questions de société et ouvre la réflexion de manière générale sur des thèmes variés : la mobilité au sens local et au sens large; l’identité rurale en milieu péri-urbain; les infrastructures nécessaires pour nos enfants aussi bien que pour nos personnes âgées; la mixité sociale; la préservation de notre environnement tout en répondant aux besoins d’une société sans cesse changeante; faire converger des modes de vie parfois très opposés, mais qui tirent le bénéfice l’un et l’autre de se rencontrer......à la Maison de la Ruralité!
Une grande toiture qui ressemble et qui rassemble .
Des matériaux locaux, naturels et sains.
Un processus participatif.